Je me suis souvent demandé comment mon cerveau avait réussi à fabriquer le sens nécessaire pour me relever aussi rapidement après le deuil de mon petit Guillaume. Avec le temps, la réflexion ainsi que mon travail en santé publique, j’ai compris que c’est notamment mon éducation et mon clan qui m’avaient offert la résilience en cadeau.

Une vie humaine comporte toujours son lot de beautés, de défis et d’épreuves

Peu importe où l’on naisse ou à quelle époque : la vie sera belle ET impitoyable, avec nos défis, nos épreuves, nos forces et nos faiblesses. C’est la condition humaine. Pour ma part, je suis née au milieu des années soixante-dix au Québec dans une famille où la diversité et l’inclusion n’était ni un tabou, ni un sujet de conversation, ni un thème à revendiquer, mais plutôt une évidence – au sens de « cela va de soi ». Chacun et chacune avait le droit d’être et de vivre selon ses envies, ses choix, sa personnalité, ses opinions, sa religion, ses origines, sa langue maternelle, sa couleur… On avait tous une place à la table.

D’ailleurs, peu importait les malheurs des uns ou les différends qu’on vivait, il y avait toujours une bonne raison pour se rassembler autour d’une table et de célébrer la beauté de la vie dans mon clan.

Ça prend un village pour élever un enfant

J’ai mis des années avant de saisir la chance d’être née dans ce clan iconoclaste et bigarré, entourée de femmes et d’hommes à la fois si extraordinaires et si ordinaires. Non, je ne suis pas née autour de gens connus, célèbres ou adulés. Aucune vie de mes proches ne sera documentée ou racontée. Mon clan était composé de voisins, d’amis d’enfance ou de voyages, de frères, de soeurs, de cousins.

L’extraordinarité de mon clan provient de l’effet cumulateur et protecteur que tous les enfants de cette tribu multifamille ont ressenti aux moments difficiles de leur enfance, puis de leur vie adulte.

Jeune, je pensais que ma mission était de créer un parcours pour moi, un chemin, une vie que j’aurais créée pour moi et qui serait belle et significative. Bien naïvement, je me pensais seule en train de bâtir cet avenir. Je ne savais pas [encore] reconnaitre l’impact des chemins parcourus par ceux et celles qui m’avaient précédé, notamment l’impact sur les possibilités de mon époque ainsi que mes propres choix et opportunités.

J’avais appris à aimer et admirer les adultes qui avaient réussi à la fois leur vie et dans la vie. Je n’avais pas [encore] compris l’immense cadeau de naître en Occident, dans les années soixante-dix, dans une famille aimante, avec des parents progressistes, entourée par d’innombrables humains courageux et imparfaits. Comme jeune adulte, je croyais que ma mission était de les « égaler » ou « de les dépasser ». De réussir autant qu’eux!… Ouf! Je me suis prise au piège bien malgré moi.

Les leçons importantes sont rarement comprises en six minutes*  

* ou en six mois. Et c’est correct ainsi!

Pourtant ce n’est pas ce qu’ils souhaitaient me transmettre – au contraire! Mais, jeunesse étant jeunesse, l’essentiel est longtemps demeuré une énigme. J’ai mis 10 ans à comprendre l’essence de ce qu’ils ont essayé de nous transmettre. Puis, 18 ans supplémentaires à être capable de l’exprimer et enfin leur témoigner ma gratitude et ma reconnaissance.

Apprendre à être inspirée sans tomber dans le piège de l’admiration 

Ces femmes fabuleuses qui m’entourent sur les photos de cet article sont fières de moi, de mon parcours, de qui je suis et de mes accomplissements. Même si je me suis souvent sentie seule à travers les difficultés et les problèmes de ma vie d’humaine, je sais aujourd’hui qu’elles – et tout mon clan – étaient toujours présentes.

Mais force est d’admettre que je n’ai pas toujours manifesté mon besoin d’être soutenue et aidée.

Avec l’écriture de mon livre, je me suis penchée sur les stratégies d’adaptation et de résilience que ma famille et moi avons su appliquer pour reprendre le cours de notre vie. En chemin, j’ai redécouvert les cadeaux que les femmes et les hommes de mon enfance m’avaient inculqués et enseignés. Certains enseignements étaient conscients; d’autres se sont faits quasiment automatiques. En prenant du recul sur mon éducation, j’ai VU et COMPRIS tous les rouages extraordinaires, les chances incalculables et la beauté de ce qui m’entoure.

Dans « Déposer les armes », il y aura tout un chapitre sur l’éducation en lien avec la résilience, mais pour tout de suite, je vous partage les sept clés que je retiens de mon éducation et de mon clan.

Sept bonnes pratiques pour activer la résilience

  • 1

    Créer une communauté autour de soi

  • 2

    Apprendre à s’aimer (oui, ça prend souvent toute une vie pour y arriver!)

  • 3

    Apprendre à faire face aux difficultés de la vie avec compassion et responsabilité

  • 4

    Apprendre et cultiver le respect pour soi et pour les autres

  • 5

    Accepter l’idée de la différence (pratiquer le non-jugement)

  • 6

    Prendre du temps pour rire, vivre et côtoyer les gens qu’on aime (soigner les relations importantes de nos vies)

  • 7

    Se réconcilier avec le fait que c’est vrai qu’on a (presque) toujours le choix devant une situation

S’inscrire dans un continuum

Aujourd’hui, je poursuis mes rêves et aspirations et plusieurs sont directement inspirés par l’héritage de mon clan. J’oserais dire que je poursuis une oeuvre collective à ma façon, selon mes envies, mes choix et les opportunités qui s’offrent à moi.

Certains de mes rêves et de mes projets professionnels sont très ambitieux et parfois frisent même l’utopie. Il est donc probable que je ne verrai pas l’aboutissement de plusieurs de mes aspirations, mais je comprends maintenant que mon travail n’est pas tant de les accomplir. Je n’ai qu’à continuer de creuser les sillons pour que d’autres avec moi et après moi poursuivent ce travail. C’est tout. Et c’est bien assez.

Remercier les femmes merveilleuses de mon enfance

Alors que j’écrivais ces idées sur mon éducation l’été dernier, j’ai eu envie de créer une occasion toute particulière pour remercier certaines des femmes qui m’ont appuyée au fil de mes épreuves et qui ont le plus influencé ma pensée, ma vie et mes choix.

Pour les remercier et leur témoigner ma gratitude, j’ai fait appel à ma superbe équipe de collaborateurs : Olivier et Patrick Turcotte des Productions COOLGRAY et Annie Garofano. Cela a donné une entrevue de 60 minutes remplie de tendresse et de rires. Ensemble, on s’est exprimé sur les moments entourant de la mort de mon fils Guillaume, sur leur parcours et leur magnifique amitié. On a aussi revisité le chemin parcouru par toutes nos contemporaines depuis le siècle dernier.

Cheers ! aux femmes et aux hommes braves et inspirants qui ont creusé des sillons d’espoir et d’opportunités avant nous. Ensemble, continuons à nous en inspirer et à nous propulser à notre tour.